Comment exploiter la réutilisation des eaux usées traitées

Comment exploiter la réutilisation des eaux usées traitées

La raréfaction de la ressource hydrique dans les régions arides ou semi-arides conjuguée à la demande et aux besoins sans cesses croissants, exacerbés de surcroit par l’explosion démographique incite les décideurs à mettre le cap sur les eaux non conventionnelles comme solutions alternatives durables qui s’inscrivent dans l’agenda du concept de l’économie circulaire.

Parmi les ressources non conventionnelles et dont le potentiel sur l’apport d’eau est conséquent, on enregistre les eaux usées traitées issues des stations d’épurations. En effet, les traitements d’élimination des matières toxiques et des germes pathogènes ainsi que les métaux lourds peuvent redonner à l’eau ses vertus de propreté, la destinant à un nouveau cycle d’utilisation et d’exploitation.

L’exploitation de cette ressource permet de réduire d’une manière drastique la pression sur les eaux conventionnelles d’eaux douces, qui aujourd’hui, est fortement menacée par les aléas climatiques de la faible pluviométrie.

Outre les efforts consentis dans les domaines technologiques de réduction des coûts de production des stations de dessalement d’eau de mer, réduction des consommations d’eau des cultures grâce aux systèmes d’innovations des irrigations agricoles, rationalisation des besoins dans le secteur industriel, les orientations actuelles doivent encore se pencher sur la réutilisation des eaux après affinement d’appoint des propriétés intrinsèques de l’eau.

Epuration des eaux usées

Irrigation et recharge des nappes souterraines

Mais la question qu’il faut poser est à quel point cette pratique est-elle sûre ? Quels sont les avantages notables de la réutilisation des eaux usées et les coûts qui y sont associés ?

C’est dans ce cadre, que beaucoup de pays, notamment asiatique (La chine, l’Inde et le Pakistan), ont expérimenté avec succès, la réutilisation des eaux usées traitées dans l’agriculture et l’aquaculture, en adaptant d’abord leurs réglementations sur les spécifications des cultures et des sols tout en apportant les correctifs nécessaires sur la qualité de l’eau correspondante. Cette tendance est suivie également par d’autres pays du continent américain, comme le Mexique. La recharge des nappes souterraines est citée comme l’une des principales réutilisations des eaux usées convenablement traitées. De Nombreux cas d’injection des eaux usées traitées dans les nappes souterraines sont signalés aux états unis (Californie, Texas, Colorado, Philadelphia, Arizona, Nevada, etc) notamment dans les aquifères salines mais aussi dans les nappes d’eau douces lorsque la qualité d’eau traitée s’approche de la fiche technique d’une eau potable[1].

Des études ont révélé que la plupart des légumes donnent des rendements plus élevés grâce à l’irrigation avec des eaux usées traitées d’origine domestique. Les besoins en engrais chimiques sont réduits, ce qui permet aux agriculteurs de réaliser des économies. D’un autre côté, les avantages de l’irrigation avec des eaux usées traitées peuvent être observés en termes d’approvisionnement efficace en nutriments et sous l’angle du recyclage de l’eau. Bien entendu, les eaux usées d’origine industrielle doivent recevoir leur traitement en amont des stations d’épuration et en aval de l’usine.

A titre d’exemple, le rapport d’enquête de l’Institut international de gestion de l’eau à l’échelle nationale du Pakistan[2] a indiqué qu’en 2004, environ 32500 ha sont directement irrigués avec des eaux usées dans ce pays de 200 millions d’habitants actuellement. Au Sénégal, environ 60% des légumes consommés sont cultivés dans les zones urbaines en irriguant un mélange d’eaux usées non traitées et d’eaux souterraines.

D’après le rapport mondial de l’ONU sur le développement de l’eau de 2017, il est estimé qu’environs 70% des eaux usées initialement traitées sont des rejets industriels et municipaux dans les pays à revenu élevé, alors qu’il n’est que de 8% dans les pays à faibles revenus et de 28% dans les pays intermédiaires.

Selon les recommandations de l’OMS consignés dans son rapport de 2012, volume IV [3], l’approche intégrée associant évaluation et gestion des risques sanitaires engendrés par l’utilisation des eaux usées domestiques sont régis par le cadre de Stockholm. Celui-ci constitue le cadre conceptuel des directives normalisées et fournit un cadre harmonisé pour l’élaboration de recommandations et de normes sanitaires en matière de dangers microbiens liés à l’eau et à l’assainissement. Dans son tableau de valeurs indicatives de vérifications et de surveillances, l’OMS indique le contrôle des Œufs d’helminthes ne dépassant pas le nombre de 1 par litre d’eau destinée à l’irrigation et en nombre inférieur à 10.000 d’E. Coli sans autres restrictions.

Les objectifs sanitaires peuvent être atteints par différents type de traitements barrières ou de mesures de protection de la santé adéquats. D’abords, assurer des traitements efficaces et des contrôles continus, renforcer par des mesures de traitements tertiaires de type membranes sélectives ou traitement oxydatifs prolongés ou bien sous irradiations UV et enfin laisser des temps d’inactivation dans des milieux de pH alcalins. Cependant, les traitements les plus efficaces, suivant la qualité visée, sont certainement ceux utilisant les technologies membranaires de type ultrafiltration, nano-filtration ou osmose inverse. Les autres techniques telles que les irradiations UV peuvent être limitées par la nature complexe et très variées des eaux usées épurées dans les STEP.

[1] M.F. DAHAB, Univ. Nebraska Lincoln, Water Arabia, 31 janvier – 2 février 2011 conference, Manama Bahrein  

[2] https://watercareservices.org/wastewater-reuse-in-the-agriculture/

[3] https://www.who.int/water_sanitation_health/wastewater/Volume4_indexpreface_fm_fr.pdf

Cas de l’Algérie … et le reste du monde.

En Algérie, d’après l’office national d’assainissement [1], le nombre de stations d’épuration s’élève à 154 dans le territoire national, tous types de traitements confondus entre boues activées, lagunage naturel et filtres plantés. Le volume d’eau épuré dépasse les 250 millions de m3 pour 10 millions équivalents habitants. Le chiffre des volumes cumulés des eaux usées avoisine 1 milliard de m3 selon les statistiques convergentes. Cette quantité est considérable et constitue une grande opportunité, d’autant que des traitements tertiaires complémentaires très efficaces sont existants et permettent d’atteindre des qualités d’eau exemptes de toutes impuretés pouvant nuire à la santé et à l’environnement. Un tel volume pourrait servir à l’irrigation d’au moins 100 miles hectares des terres arables.

[1] https://ona-dz.org/L-ONA-en-chiffres.html

Les statistiques de la littérature scientifique mentionnent qu’en 2001, il y a eu au moins 50 pays qui irriguent environs 18% des terres cultivées par des eaux usées traitées, correspondant à l’équivalent de 20 millions d’hectares et permettant de fournir pas moins de 40% de la nourriture aux populations.

L’irrigation par les eaux usées correctement traitées est une source alternative fiable. En fait, c’est là où se situe le changement de paradigme de la gestion des eaux usées de « traitement et élimination » à « réutilisation, recyclage et récupération des ressources ». L’utilisation utile des eaux usées traitées représente une ressource largement précieuse et disponible.

D’autres destinées de l’eau réutilisée peuvent trouver preneurs dans le secteur du bâtiment et de l’aménagement des territoires où les limites des valeurs garanties de DBO = 30 mg/L; TSS = 30mg/L; E.C. = 200/100mL sont suffisants. C’est le cas des cimenteries ou l’industrie sidérurgique par exemple.

By : M.A